Le vice et la vertu

07/01/2022

Dans la veine du précédent article, je reviens sur mes sources d'inspiration mythologiques et notamment la religion judéo-chrétienne (dans le respect des croyances de chacun). Après les péchés "capitaux", passons aux sept Vertus catholiques. Nettement moins connues que les Sept Péchés Capitaux, auxquelles elles s'opposent partiellement. Elles se décomposent en deux groupes : cardinales (propres à l'Homme) et théologales (accordées par Dieu).

- La Prudence : principale des vertus cardinales, elle est assimilée à la raison longuement développée par les philosophes grecs avant même l'ère du catholicisme. Elle incite à réfléchir posément au lieu d'agir dans l'impulsion. Elle est censée, de façon très manichéenne, aider à dissocier le Bien du Mal. Dans l'art Renaissance, elle est associée à un miroir (où seule la vérité se reflète) et à un serpent (le mensonge) fermement tenu en main, pour l'empêcher de nuire. Son opposé serait l'insouciance, le fait de ne rien anticiper et de ne jamais se soucier des conséquences.

- La Tempérance :  très chère aux croyants radicaux, c'est la maîtrise des désirs et des instincts. Notamment ceux ayant traits aux Péchés Capitaux : l'attrait pour la nourriture et la boisson, les biens, le sexe... Mais aussi contrôler ses envies de violence, de vengeance ou de vanité. Pourtant, s'il faut être mesuré en tout, n'est-ce pas aussi le cas quand on se mesure ? N'est-il pas bon de libérer ses frustrations de temps à autre ? De façon générale, il s'agit de demeurer modéré en tout et de respecter l'ordre, en accord avec les valeurs morales de la société. Son attribut est deux coupes que l'on transvase, pour utiliser la mesure. Ses opposés seraient les excès.

- La Force d'âme : la plus nébuleuse des vertus cardinales. Ce serait un équivalent du courage, de la capacité de résilience face à toutes les difficultés de la vie, l'aptitude à surmonter les obstacles et (en lien avec la tempérance) à résister aux tentations. Elle vainc la peur de la mort et de la douleur. Elle se manifeste aussi bien dans la paix que dans la guerre par l'honneur, la charité et la mansuétude. Mais, à tort, certains théologiens y associèrent la force physique (cela devenait donc un apanage masculin et rejetait le péché sur la femme). On la figure comme une femme couronnée levant un glaive. La lâcheté et la vilénie sont ses opposés.

- La Justice est la dernière vertu cardinale. Elle nait des trois autres. Comme les précédentes, elle n'est pas une invention chrétienne mais un héritage grec. Elle est la volonté, constante dans le temps et dans l'intensité, de donner à chacun ce qui lui est dû - c'est donc extrêmement subjectif. Elle incite aussi à ne pas vouloir les biens d'autrui (même quand on ne possède rien) et à ne pas donner de valeur à sa vie quand on peut la sacrifier pour le bien commun. Elle renvoie à la morale, donc varie selon les lieux et les époques. Ses symboles sont bien évidemment une balance et l'épée qui rend les jugements. Elle s'oppose à l'iniquité, la jalousie et l'envie.

- La Foi est une vertu théologale qui consiste en une confiance aveugle en la Bible et en l'Eglise, car ils sont censés être les vecteurs infaillibles de la vérité divine. Car la foi incite aussi à douter de tout ce qui n'adhère pas à cette vérité. Elle ignore toute nuance. La foi est temporaire : au Jugement Dernier, Dieu apparaîtra et aucun doute ne subsistera. On ne peut que regretter le caractère absolu et manichéen, mis à mal par la science moderne. Ses emblèmes sont le livre (la Bible), la coupe (chargée d'hosties) et la colombe (l'Esprit-Saint). Ses contraires sont l'impiété mais aussi, indirectement, la curiosité et le scepticisme.

- L'Espérance est le cœur de la religion, car c'est la ligne de conduite qui pousse à respecter la morale dans l'espoir d'entrer au Paradis. C'est donc assez vénal. Néanmoins, elle est indispensable à toute société, y compris si elle n'est pas religieuse. La morale, aussi subjective qu'elle soit, maintient l'ordre public. Là encore, la "fin des temps" fera cesser cette vertu car tout sera accompli, il ne sera plus temps de changer son attitude. On la représente par une ancre, qui rend ferme dans la "tempête" de l'existence, voire par une barque qui incarne la vie. Elle s'oppose au désespoir et, comme à la tempérance, à quiconque vit librement sans peur du lendemain.

- La Charité, enfin, est l'amour des autres... mais surtout l'amour de Dieu avant toute autre chose, même soi ou les siens. C'est la plus importante de toutes les vertus. Elle survivra au Jugement Dernier car Dieu sera présent, or Dieu est la charité. CQFD. D'ici là, elle s'applique dans la bonté et le partage. C'est donc un concept plutôt flou et elle n'a aucun attrait autre que l'entrée au Paradis, aucune loi physique ne la rend obligatoire. Ses symboles sont des enfants, des femmes dépoitraillées et bras ouverts (incarnant l'accueil et la nourriture), ou un cœur enflammé. Son contraire est l'égoïsme, il renvoie au péché d'Avarice.



Qu'on y adhère ou non, il est toujours intéressant de se pencher sur la façon de penser d'autrui, dans le but de mieux comprendre le monde. C'est que j'ai fait en amont de l'écriture de plusieurs romans, et ce que vous avez fait en lisant cet article, alors merci de l'avoir suivi !