Rapport à la religion dans la saga

03/07/2022

Être transparent, à l'image de ce titre très informatif, est ma volonté du jour. Après avoir passé des mois à vous informer de mes sources dans les "religions du Livre", vient la question du rapport à la Religion (toutes croyances confondues) véhiculé par mes écrits.

Même si je ne me pose pas souvent la question, je pense pouvoir être rattaché au scepticisme. En effet, bien que cela puisse sembler étrange pour qui crée des mondes plein de magie et de créatures surnaturelles, je suis de formation scientifique et j'ai l'esprit très cartésien. Or, il n'y a aucune preuve scientifique qui confirme ou infirme l'existence d'un ou plusieurs dieux. Bien que les divinités soient souvent présentes dans mes romans, je n'affirme donc ni leur réalité ni leur irréalité dans la "vraie" vie, ils restent dans le domaine de la fiction. Et quand bien même j'aurais eu une croyance, des ouvrages de divertissement à l'attention du grand public ne sont pas un bon théâtre pour en vanter les mérites. J'ai aussi une tendance "déiste", cette philosophie qui admet l'existence d'une force supérieure mais refuse de l'appeler Dieu, au moins dans la vision qu'en donnent les religions. La construction de mon univers régi par l'Equilibre et ses enfants, le Destin et Dame Nature, en est un bon reflet.

Après avoir étudié une quarantaine de panthéons venus de tous les coins du globe, je peux toutefois dégager de leurs légendes que les dieux ne sont pas des êtres parfaits. En proie aux mêmes travers que les humains (jalousie, colère, passion...) et souvent cruels envers ceux qui les défient, ils n'ont vraiment rien de propre à inspirer le respect, si ce n'est leur pouvoir surnaturel. Pourquoi donc leur rend-on ce culte immérité ? Par crainte d'une part, afin d'éviter une vengeance. Par intérêt ensuite, même s'ils répondent rarement aux voeux. Ce n'est ni plus ni moins que du racket, l'expression de la loi du plus fort.

Inconsciemment, je pense que cette conviction m'a aiguillé quand j'ai créé les Gardiens, ces êtres eux aussi immortels et capables de prodiges magiques mais droits, honnêtes, discrets (loin des cultes tape-à-l'oeil). Ils sont détestés des dieux car ils leur font concurrence, mais aussi car ils leur renvoient leurs défauts. Là encore, même s'ils sont un peu idéalisés, les Gardiens ne sont pas parfaits : ils sont juste bienveillants et ça fait déjà une sacrée (sans mauvais jeu de mots) différence avec les dieux. Enfin, les Gardiens ne craignent rien ni personne, ni dieux ni démons qu'ils surclassent, et cette impudence s'est transmise à leurs enfants les Sang-Mêlé.

Qu'en est-il de mes autres personnages ? Bien sûr, Salamandre la fragile humaine se montre respectueuse envers les dieux, elle qui n'est qu'une simple villageoise... mais jusqu'à un certain point seulement. Sa première rencontre divine est avec Belisama, et la déesse la met vite à l'aise au lieu d'exiger un respect exagéré. Ensuite, elle tient tête et - bien malgré elle - menace Manannan. Le Corbeau apparait comme un simple oiseau et, de fait, n'inspire pas vraiment le respect. Quilla n'intervient pas directement et Amaterasu n'est qu'une voix. On est loin de la terreur superstitieuse que sont censés inspirer les divinités. Et je peux vous garantir que, grâce au secret qu'elle découvre à la fin de son premier voyage, Salamandre ne les craindra plus par la suite.

Pour ce qui est de Cordélia, on respecte le même modèle d'humaine fragile face aux dieux tout-puissants, que l'insolence typiquement "gardienne" d'Amber va d'abord choquer. Et même si Cordélia n'était pas bigote, sa vie compliquée ne lui permettant pas de s'embarrasser de considérations religieuses, en atteste son premier échange avec l'ange Luxdel qui ressemble plus à une conversation au café... En voyant l'état lamentable de son monde, toutefois, Cordélia commence à sentir sa foi vaciller. Il n'est pas question de se demander si les dieux existent ou non, c'est un fait admis, mais de savoir dans quelle mesure ils méritent tout ce qu'on leur donne. Et aussi, d'à quel point ils sont dignes ou non de confiance.